La loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018 entrée en vigueur le 24 octobre 2018, complète la loi ESSOC qui a institué l’emblématique « droit à l’erreur ». En voici les mesures phares :
1. La fin du verrou de Bercy
Jusqu’à lors, le lancement des poursuites par le parquet était conditionné au dépôt d’une plainte du fisc après avis de la Commission des infractions fiscales (CIF).
Accusé de favoriser une certaine forme d’opacité, ce dispositif a réellement connu ses limites à l’occasion de l’affaire Cahuzac : alors ministre du budget, il aurait dû décider d’engager ou non des poursuites contre lui-même.
Désormais, l’administration est tenue de transmettre au parquet les dossiers les plus graves, (montants éludés supérieurs à 100.000 € avec les majorations les plus élevées) et les poursuites pénales ne requièrent plus sa plainte préalable.
2. Le « Name and Shame »
« Il faut que le peuple français sache qui cherche à s’exonérer des obligations fiscales légitimes qui sont à la charge de chacun ».
La pratique du « name and shame » (« nommer et faire honte »), consiste à désigner publiquement le nom des fraudeurs à des fins dissuasives : elle s’inscrit dans la mouvance de « moralisation des comportements et de la vie publique ».
Alors qu’il s’agissait pour le juge d’une simple possibilité, la publicité sera obligatoire en cas de condamnation pénale tandis que le Fisc pourra procéder à sa propre publicité des sanctions fiscales appliquées aux personnes morales à raison de manquements graves.
3. Le « plaider coupable » fiscal
« Accélérer les procédures judiciaires et la réparation sans amoindrir le niveau des peines. »
Alors que la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, dite « du plaider coupable » n’était pas applicable à la fraude fiscale, la mesure fait suite à la suppression du verrou de Bercy risquant d’accroître le nombre de dossiers traités par le parquet.
4. La création d’une police fiscale à Bercy
« Accroître les capacités d’enquête judiciaire en cas de fraude. »
Autrefois réservée à la Brigade nationale de répression de la délinquance fiscale, cette nouvelle loi dote Bercy de sa propre police, suscitant la polémique sur l’éventualité d’une « guerre des polices ».
5. Sanctions contre les intermédiaires fiscaux
« Sanctionner les auteurs de la fraude, mais aussi ses ‘ingénieurs’, diffusant des schémas frauduleux »
L’instauration d’une amende égale à 50 % des revenus tirés de la prestation sans pouvoir être inférieure à 10 000 € visera les officines d’optimisation fiscale, avocats, conseillers financiers, notaires, experts-comptables…
6. Lutter contre la fraude fiscale sur internet
Transmission automatique des revenus générés par les utilisateurs des plateformes d’économie collaborative : lutter contre la fraude fiscale sur internet. Outre l’instauration d’un régime de responsabilité solidaire des plateformes en ligne pour le paiement de la TVA, les plateformes collaboratives devront transmettre à l’administration un document mentionnant : identification de l’utilisateur, statut professionnel ou particulier, nombre et montant des transactions réalisées et coordonnées du compte bancaire de versement des revenus.
La loi ESSOC a habilité le Gouvernement à prendre des ordonnances pour renforcer la sécurité fiscale des entreprises. La Direction générale des finances publiques a lancé une consultation en ligne ouverte aux entreprises portant notamment sur :
- une offre d’accompagnement fiscal « Confiance Plus » dispensé par l’administration fiscale elle-même.
- la mise en place d’un « guichet » de régularisation fiscale.
- la création d’un examen sur demande de la conformité de leurs opérations à la loi fiscale.
- la possibilité pour les commissaires aux comptes d’attester après examen de la conformité fiscale de l’entreprise.
Affaire à suivre donc …
Hélène BOREAU
Publié le 8 février 2019, dans le magazine L’Informateur Judiciaire n° 6925.